20 août
Mettre
en Dieu son espérance.
(Règle
de Saint Benoît 4,41)
La
Règle de Saint Benoît…
RB 64,1-6 (L'institution de l'abbé)
¹Dans l'institution de l'abbé, on aura pour règle constante d'établir
celui que toute la communauté, inspirée par la crainte de Dieu, aura élu d'un
commun accord, ou même celui qu'aura choisi une partie de la communauté, même
faible, mais au jugement plus sage. ²Dans cette élection, on aura égard au
mérite de la vie et à la doctrine spirituelle du candidat, quand bien même il
occuperait le dernier rang dans la communauté. ³Si, par malheur, il arrivait
que la communauté tout entière, d'un commun accord, eût élu une personne
complice de ses dérèglements, ⁴lorsque ces dérèglements parviendront à la
connaissance de l'évêque, au diocèse duquel appartient le monastère ou des
abbés et des chrétiens du voisinage, ⁵ils empêcheront l'accord des méchants de
prévaloir. Ils pourvoiront eux-mêmes d'un digne chef la maison de Dieu : ⁶assurés qu'une bonne récompense leur est réservée, s'ils agissent dans une intention
pure et par le zèle de Dieu; comme au contraire ils commettraient un péché
s'ils négligeaient d'intervenir.
…
pour chaque jour
Avant Benoît, on trouvait dans le monachisme
chrétien deux traditions qui avaient évolué parallèlement : l’une selon
laquelle le supérieur d’un groupement monastique était nommé par une autorité
externe à la communauté, d’habitude l’évêque, et l’autre, selon laquelle l’abbé
était choisi par la communauté elle-même. Benoît se situe nettement
dans la seconde.
Il faut remarquer toutefois que Benoît, dans
ce bref texte, n’entend pas proposer un rituel d’élection abbatiale et encore
moins un vade mecum de caractère canonique. Ce qui
l’intéresse c’est d’établir les principes spirituels de l’institution de
l’abbé. Le rôle spirituel de l’abbé, comme étant celui qui doit
exercer une paternité spirituelle en aidant ses frères à naître dans le Christ
et en favorisant la croissance du Christ en eux, est pris pour
acquis. Il a déjà dit et redit de diverses façons, que cette paternité
s’exerce avant tout à travers un enseignement qu’il est appelé à donner par sa
doctrine et par sa vie. La conclusion normale est donc celle énoncée
ici, au verset 2 : « C’est pour le mérite de sa vie et sa doctrine de
sagesse que sera élu celui qu’il faut instituer, même s’il est le dernier par
son rang dans la communauté ».
Cette dernière note est d’autant plus
remarquable que l’on se souviendra de l’importance qu’avait à l’époque de
Benoît (comme nous l’avons vu dans les chapitres précédents) le
« rang » dans la communauté. Lorsqu’il s’agit de choisir
un abbé, ce rang (basé sur l’ancienneté) n’a aucune importance. Une
communauté doit se demander, au moment d’une élection abbatiale, « quel
frère est le plus indiqué pour la guider, compte tenu de la qualité de sa vie
spirituelle et de sa capacité à transmettre une doctrine de sagesse, quels que
soient son âge et son ancienneté en communauté, fût-il le plus jeune ou le
dernier entré.
La
communauté, même si elle est juridiquement autonome, fait partie d’un groupe plus
grand qui est l’ensemble du peuple de Dieu. Benoît prévoit le cas où
une communauté serait tombée dans la décadence et aurait perdu le sens de sa
raison d’être spirituelle. Dans ce cas il invite non seulement
l’évêque diocésain ou les abbés de la région, mais aussi les chrétiens du
voisinage à intervenir et à voir à ce qu’un abbé digne soit mis à la tête de la
communauté. Il est sûr qu’une telle intervention poserait des
problèmes juridiques et ne se ferait pas facilement. D’ailleurs
Benoît n’a aucunement l’intention ici de décrire une procédure. Il
affirme simplement un principe spirituel. Et ce principe est
toujours valable. Le charisme monastique appartient à l’ensemble du
peuple de Dieu, et non seulement à ceux qui vivent ce charisme à un moment
déterminé de l’histoire. Le charisme d’une communauté est plus grand
que ceux qui vivent actuellement dans cette communauté et qui sont les
dépositaires de ce charisme. C’est dans ce sens qu’il faut
comprendre la remarque de Benoît voulant que normalement c’est l’ensemble de la
communauté qui, d’un commun accord, choisit son abbé, mais qu’en certains cas
(évidemment exceptionnels) une autorité extérieure peut intervenir pour faire
prévaloir le choix de la partie la plus saine de la communauté, même si elle
est minoritaire.
(Dom ARMAND VEILLEUX ocso [°1937 - …], Commentaire de la Règle de saint Benoît, Abbaye Notre-Dame de Scourmont, 9 décembre 2001)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire