18 février
Qu’il n’aime point l’un plus que
l’autre,
si ce n’est celui
qu’il trouvera plus avancé
dans les bonnes
actions et l’obéissance.
(Règle de Saint
Benoît 2,17)
RB 15,1-4 (Quand dire l'Alléluia)
¹Depuis la sainte Pâque jusqu'à la Pentecôte, on dira l'Alléluia
sans exception, tant aux psaumes qu'aux répons. ²Depuis la Pentecôte jusqu'au
commencement du Carême, on le dira chaque nuit avec les six derniers psaumes
des Nocturnes seulement. ³Tous les dimanches hors du Carême, on dira avec l'Alléluia,
les Cantiques, Laudes, Prime, Tierce, Sexte et None; mais les Vêpres se
chanteront avec antienne. ⁴On ne dira jamais les répons avec l'Alléluia,
sinon de Pâques à la Pentecôte.
✽ ✽ ✽
... pour chaque jour
’une des grandes richesses de la
vie monastique – qui contraste vivement avec les schémas culturels de
l’Amérique – est la vie commune de plusieurs générations côte à côte, jour
après jour. Dans ma communauté nous avons des moines de tous les âges depuis
ceux qui ont une vingtaine d’années jusqu’à ceux qui ont dépassé quatre-vingt-dix
ans ; et nous sommes là tous ensemble, y compris les mourants et nous nous
aidons mutuellement à mourir.
Frère Antoine vivait une longue
agonie. Il se cramponnait à la vie de toutes ses forces car, en dépit de sa
faiblesse et de sa souffrance, la vie lui paraissait préférable à la mort. Il
ne cessait de remettre à plus tard le passage de peur de ne pas bien mourir, de
ne pas se présenter à Dieu dans la bonne disposition. Un grand nombre d’entre
nous nous arrêtions et nous efforcions de le convaincre de la miséricorde de
Dieu, en l’exhortant à ne pas trop s’inquiéter, comme il avait dû le faire
lui-même pour d’autres au cours de sa longue vie de moine et de prêtre.
Pâques approchait et il était
encore vivant. Au milieu de la nuit du Samedi Saint les moines étaient réunis
pour la longue veillée de Pâques qui célébrerait la résurrection du Christ.
Frère Jacques était l’infirmier de la communauté et était aussi chargé
d’assurer avec d’autres la liturgie de la Veillée. Déjà vêtu de sa longue aube
blanche, et comme il disposait d’un peu de temps avant que ne débute la
cérémonie, il décida d’aller s’assurer que Père Antoine dormait bien. Il entra
dans sa cellule une bougie allumée à la main pour ne pas le réveiller. Mais
Père Antoine fit un mouvement, et distinguant la silhouette illuminée, toute de
blanc vêtue, il pensa qu’il devait s’agir d’un ange et par conséquent s’écria
immédiatement : « Hallelujah ! », croyant peut-être bien
faire. Frère Jacques fut pris de court, non seulement par le cri soudain
inattendu mais aussi par le terme saugrenu ; car dans la tradition
catholique nous utilisons le terme plus commun d’ « Alléluia », et de
toutes manières, ce n’est pas le genre de termes que nous, moines, utilisons
pour nous adresser les uns aux autres. Que cherchait exactement à exprimer Père
Antoine ? Frère Jacques dit doucement : « Excusez-moi
Père ? » Père Antoine répéta : « Hallelujah ? »
Le second cri fut plus hésitant, bien qu’il n’eût pas perdu tout espoir. Frère
Jacques s’approcha de ce visage qui – nous dit-il plus tard – semblait perdu.
Il dit : « Qu’y a-t-il Père ? Avez-vous besoin de quelque
chose ? » Un éclair de lucidité illumina le visage du vieux moine, ou
plutôt devrais-je dire, l’assombrit un instant et il s’écria très déçu :
« Ah malédiction, Jacques, c’est vous ! »
(Jeremy Driscoll osb, L’Alphabet du Moine – Moments de silence
dans un monde qui change, Éd. Salvator, Paris, 2008, p. 22-23.)
* Initiale - Ms Abbaye de Maredret
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