13 août

S’appliquer fréquemment à la prière.
(Règle de Saint Benoît 4,56)



La Règle de Saint Benoît…

RB 59,1-8 (Les fils de notables ou de pauvres qui sont offerts)

¹Lorsqu'une personne de condition notable veut offrir son fils à Dieu dans le monastère, et si c'est un jeune enfant, ses parents rédigeront eux-mêmes la demande écrite dont nous avons parlé. ²Ils envelopperont cette demande et la main de l'enfant, avec l'offrande, dans la nappe de l'autel, et ils l'offriront ainsi. ³Quant à leurs biens, ils promettront sous serment, dans la demande même, de ne jamais rien lui en donner, ni par eux-mêmes, ni par personne interposée, ni d'aucune manière, ni même de lui fournir l'occasion d'en posséder ; ou bien, s'ils ne veulent pas agir ainsi, et qu'ils veuillent cependant offrir quelque chose en aumône au monastère comme rétribution, ils en feront donation à la communauté, s'en réservant l'usufruit durant leur vie, s'il leur plaît. De la sorte, on fermera à l'enfant toute sortie, si bien qu'il ne lui restera aucun espoir, qui ne servirait - ce qu'à Dieu ne plaise - qu'à le tromper et à le perdre, comme nous l'avons appris par l'expérience. Les moins fortunés agiront de même. Ceux qui ne possèdent absolument rien, feront simplement la demande écrite et offriront leur fils, avec l'offrande, en présence de témoins.



… pour chaque jour

En premier lieu, tenant compte du sens de puer dans le latin chrétien, il s’agissait de grands adolescents, plutôt que d’enfants au sens actuel du mot. Et puis Benoît se situe dans la culture de l’Empire romain, où c’étaient les parents qui, en suivant des codes très précis, décidaient de l’avenir de leurs enfants, en organisant leur mariage, souvent à un âge très jeune. De même, tout comme des enfants étaient consacrés à Dieu dans le judaïsme et élevés à l’ombre du Temple, de même des enfants – où plutôt de grands adolescents – étaient consacrés à Dieu dans la vie monastique. On avait alors conscience de leur faire une faveur alors que de nos jours on est plus attentif au fait qu’on ne respectait pas leur liberté et hypothéquait leur avenir. Cette problématique a des points communs avec la question du baptême des enfants, qui acquièrent des obligations avant de pouvoir les choisir librement.
C’est d’ailleurs un point sur lequel Benoît innove par rapport à la tradition monastique antérieure. Pour saint Basile, par exemple, l’engagement au célibat ne pouvait se faire qu’à l’âge adulte, lorsqu’on était en état de comprendre ce que signifiait la renonciation au mariage. Ce fut d’ailleurs la position de toute l’Église ancienne, en Orient comme en Occident, avec saint Augustin et jusqu’au pape saint Léon. La tradition bénédictine postérieure des « écoles monastiques », où des jeunes sont formés au monastère, mais sans être membres de la communauté, avait d’ailleurs des antécédents chez saint Basile en Cappadoce.
En réalité, lorsque Benoît parle d’enfants « minores aetate », il parle de l’âge légal et il traite surtout dans ce chapitre des problèmes d’héritage et de propriété matérielle. De ce point de vue matériel, Benoît n’est pas du tout soucieux que la part d’héritage qui devait revenir à l’enfant passe au monastère. Il prévoit plutôt que les parents en fassent ce qu’ils veulent mais qu’ils n’en réservent rien pour l’enfant. Cette façon de déshériter l’enfant nous paraît cruelle, mais dans l’esprit du temps le but était d’assurer à l’enfant une pleine liberté de cœur. (En réalité la liberté de choix est affectée tout autant par la présence que par l’absence d’une fortune). Toujours est-il qu’il n’est pas très facile de réconcilier cette pratique, telle qu’elle est décrite dans ce chapitre de la Règle, avec l’insistance de Benoît dans le chapitre précédent sur le fait que celui qui se convertit à la vie monastique à l’âge adulte doit le faire en pleine connaissance de cause et après longue et mûre délibération. 

(DOM ARMAND VEILLEUX ocso [°1937 - …], Commentaire de la Règle de saint Benoît, Abbaye Notre-Dame de Scourmont, 9 septembre 2012)









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