10 octobre
L’abbé
témoignera à tous une égale charité…
(Règle de Saint Benoît 2,22)
(Règle de Saint Benoît 2,22)
La
Règle de Saint Benoît…
RB 7,62-70 (L'humilité)
⁶²Voici le douzième degré d'humilité: le moine non seulement possède
cette vertu dans son cœur, mais encore la manifeste au dehors par son attitude. ⁶³À l'Œuvre de Dieu, à l'oratoire, dans le monastère, au jardin, en chemin,
aux champs, qu'il soit assis, en marche ou debout, il aura toujours la tête
inclinée, le regard fixé à terre ⁶⁴se sentant à toute heure chargé de ses
péchés, il se voit déjà traduit devant le tribunal redoutable de Dieu, ⁶⁵et
répète toujours dans son cœur ce que le publicain de l'Evangile disait, les
yeux fixés à terre: « Seigneur, je ne suis pas digne, moi, pécheur, de
lever les yeux vers le ciel »; ⁶⁶et encore avec le Prophète: « Je me
tiens courbé et humilié de toute manière. » ⁶⁷Après avoir gravi tous ces
degrés d'humilité, le moine parviendra bientôt à cet amour de Dieu, qui, devenu
parfait, bannit la crainte. ⁶⁸Grâce à cet amour, il accomplira sans peine,
comme naturellement et par habitude, ce qu'auparavant il n'observait qu'avec
frayeur. ⁶⁹Il n'agira plus sous la menace de l'enfer, mais par amour du
Christ, par l'accoutumance même du bien et par l'attrait des vertus. ⁷⁰Voilà
ce que le Seigneur daignera manifester dans son serviteur, purifié de ses
défauts et de ses péchés, grâce à l'Esprit-Saint.
…
pour chaque jour
Il est avec son amour comme l’enfant devant le mur avec sa balle :
il lance sa parole, la balle de parole lumineuse, le « je t’aime »
enroulé sur lui-même, il la lance contre un mur éloigné de lui de tous les
jours qu’il lui reste à vivre, il attend ensuite que la balle rebondisse, il
lance des milliers de balles, aucune ne revient jamais, il continue, toujours
souriant, confiant : le jeu est à lui-même sa récompense, l’amour est à
lui-même sa réponse.
Si, quand même, il en dit un peu plus. Il dit : je t’aime et je suis désolé de t’aimer si peu, de t’aimer si mal, de ne pas savoir t’aimer. C’est que plus il s’approche de la lumière, et plus il se découvre plein d’ombres. Plus il aime et plus il se connaît indigne d’aimer. C’est qu’il n’y a pas de progrès en amour, pas de perfection que l’on pourrait un jour atteindre. Il n’y a pas d’amour adulte, mûr et raisonnable. Il n’y a devant l’amour aucun adulte, que des enfants, que cet esprit d’enfance qui est abandon, insouciance, esprit de la perte d’esprit. L’âge additionne. L’expérience accumule. La raison construit. L’esprit d’enfance ne compte rien, n’entasse rien, ne bâtit rien. L’esprit d’enfance est toujours neuf, repart toujours aux débuts du monde, aux premiers pas de l’amour. L’homme de raison est un homme accumulé, entassé, construit. L’homme d’enfance est le contraire d’un homme additionné sur lui-même : un homme enlevé de soi, renaissant dans toute naissance de tout. Un imbécile qui joue à la balle. Ou un saint qui parle à son Dieu. Ou les deux à la fois.
Si, quand même, il en dit un peu plus. Il dit : je t’aime et je suis désolé de t’aimer si peu, de t’aimer si mal, de ne pas savoir t’aimer. C’est que plus il s’approche de la lumière, et plus il se découvre plein d’ombres. Plus il aime et plus il se connaît indigne d’aimer. C’est qu’il n’y a pas de progrès en amour, pas de perfection que l’on pourrait un jour atteindre. Il n’y a pas d’amour adulte, mûr et raisonnable. Il n’y a devant l’amour aucun adulte, que des enfants, que cet esprit d’enfance qui est abandon, insouciance, esprit de la perte d’esprit. L’âge additionne. L’expérience accumule. La raison construit. L’esprit d’enfance ne compte rien, n’entasse rien, ne bâtit rien. L’esprit d’enfance est toujours neuf, repart toujours aux débuts du monde, aux premiers pas de l’amour. L’homme de raison est un homme accumulé, entassé, construit. L’homme d’enfance est le contraire d’un homme additionné sur lui-même : un homme enlevé de soi, renaissant dans toute naissance de tout. Un imbécile qui joue à la balle. Ou un saint qui parle à son Dieu. Ou les deux à la fois.
(CHRISTIAN BOBIN [°1951 – 〸2022], Le Très-Bas, Coll. L’un et
l’autre, dirigée par J.-B. Pontalis, Éditions Gallimard, 1992, p. 112-113)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire