26 septembre

Ne jamais perdre la charité.
(Règle de Saint Benoît 4,26)


La Règle de Saint Benoît…

RB 7,5-9 (L'humilité)

Si donc, mes frères, nous voulons atteindre au sommet de l'humilité parfaite, et parvenir rapidement à cette hauteur céleste, à laquelle on monte par l'humilité dans la vie présente, il nous faut monter et dresser par nos actions cette échelle qui apparut en songe à Jacob. Il y voyait des anges descendre et monter. Cette descente et cette montée assurément ne signifient pas autre chose pour nous sinon que l'on descend par l'élèvement et que l'on monte par l'humilité. L'échelle en question, c'est notre vie en ce monde, que le Seigneur dresse vers le Ciel, si notre cœur s'humilie. Les côtés de cette échelle figurent notre corps et notre âme; sur ces côtés, l'appel divin a disposé divers degrés d'humilité et de perfection à gravir.

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… pour chaque jour

Tel qu’on peut l’y voir, agenouillé sur les pierres ou allongé sur l’herbe, priant ou dormant, oui, tel qu’on peut le voir il a quatre mille ans. Quatre mille ans et des poussières. Il vient en droite ligne d’Abraham. Ses cousins, ses neveux et ses oncles sont là auprès de lui, couchés dans la Bible où ils récitent un psaume du roi David – le secrétaire bien-aimé du Dieu puissant. S’ouvre devant lui, à cette heure, une carrière de fou ou de saint. La différence au départ est inexistante. C’est après qu’elle s’agrandit, c’est après qu’elle se voit. Mais au départ le fou et le saint se ressemblent comme deux frères jumeaux. Au départ ils disent tous deux la vérité. Au départ le fou et le saint ont cette même insensée prétention de dire la vérité. C’est après que cela se gâte. Le fou est celui qui, énonçant la vérité, la rabat sur lui, la capte à son profit. Le saint est celui qui, énonçant la vérité, la renvoie aussitôt à son vrai destinataire, comme on rajoute sur une enveloppe l’adresse qui manquait. Je dis le vrai donc je ne suis pas fou, dit le fou. Je dis le vrai mais je ne suis pas vrai, dit le saint. Je ne suis pas saint dit le saint, seul Dieu l’est, à qui je vous renvoie. Les fous et les saints se côtoient dans l’Histoire. Ils se frôlent, ils se cherchent et parfois se rencontrent pour le plus grand malheur du fou, pour son plus beau désastre. (…) Le fou est dans la compagnie des morts. Il a son visage tourné vers l’ombre. Plus rien ne lui arrive que du passé. Il ne peut se lier à rien ni personne, il ne peut nouer aucune histoire vivante avec les vivants. Le saint a son visage tourné comme une proue vers ce qui vient de l’avenir pour féconder le présent – pollen de Dieu transporté par toutes sortes d’anges. Le saint n’en finit pas de relier le proche au lointain, l’humain au divin, le vivant au vivant. 

(CHRISTIAN BOBIN, Le Très-Bas, Coll. L’un et l’autre, dirigée par J.-B. Pontalis, Éditions Gallimard, 1992, p. 75-77)









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