6 octobre

Nul ne cherchera ce qu’il juge utile pour soi,
mais bien plutôt ce qui l’est pour autrui.
(Règle de Saint Benoît 72,7)



La Règle de Saint Benoît…

RB 7,55 (L'humilité)

⁵⁵Voici le huitième degré d'humilité: le moine ne fait rien que ce qui lui est prescrit par la règle commune du monastère et conseillé par les exemples des Pères.






… pour chaque jour

Une lecture superficielle de ce texte pourrait nous donner l’impression que Benoît attend des moines une obéissance mécanique aux prescriptions de la Règle et à l’exemple des anciens.
(…) ce seul degré, même s’il est fort bref, traite d’une réalité importante dans toute vie : la créativité. (…)
Une fois de plus, Benoît est préoccupé du faire. Nous sommes au monastère pour faire la volonté de Dieu, pour faire la Vérité, selon l’expression de l’Évangile, pour agir constamment selon les préceptes de l’Évangile appliqués à la vie monastique. Il ne s’agit donc de faire n’importe quoi, mais de canaliser notre créativité en ne faisant que ce qui est « encouragé » par la Règle. Le mot latin utilisé (cohortatur) ne signifie pas « permettre », mais bien encourager, exhorter à faire. (…)
Il n’y a pas de vie réelle sans créativité. Mais la créativité est quelque chose de beaucoup plus profond que l’épanouissement de son « ego ». Paradoxalement, celui qui est préoccupé de « se réaliser », de devenir quelqu’un qui sera reconnu et admiré, étouffe en lui-même la créativité, devenant l’esclave de ce que les autres attendent de lui, ou de ce qu’il pense ou désire qu’on attende de lui, ou encore de l’image qu’il s’est faite de lui-même.
La première créativité à laquelle nous sommes appelés est celle d’un être libre, donc détaché. Un être qui ne dépend pas de l’estime et de l’appréciation des autres. Un être qui se contente d’être qui il est devant Dieu. Un être qui s’est libéré – détaché – de tous les obstacles pour laisser Dieu le façonner à l’image de son Fils. (…)
On trouve dans la littérature contemporaine plusieurs définitions de la créativité. Une conception assez répandue est qu’une création est nécessairement une création ex nihilo. L’accent est mis principalement sur l’originalité, le caractère unique. Cela conduit assez facilement au narcissisme. Mais je préfère encore la vision de la Genèse. La création n’y est pas présentée comme ex nihilo. Au commencement il y avait le tohu bohu, un amas sans forme. L’activité de Dieu consiste à instaurer de l’ordre dans ce désordre. La créativité est vue comme un processus d’ordre, d’intégration, d’unification, d’unité.
C’est la créativité dont parle Benoît dans ce huitième degré d’humilité : établir en soi l’harmonie, l’ordre, l’unité, en se fondant dans une harmonie communautaire, selon un mouvement plus grand que nous, en se coulant dans un rythme, un chant, une danse, qui s’enracine dans une longue tradition. 

(DOM ARMAND VEILLEUX ocso [°1937 - …], Commentaire de la Règle de saint Benoît, Abbaye Notre-Dame de Scourmont, 30 mai 2010)


La Cathédrale d'Anvers
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