26 décembre

Voyez comme le Seigneur lui-même, dans sa bonté,
nous montre le chemin de la vie.
(Règle de Saint Benoît – Prologue 20)



La Règle de Saint Benoît…

RB 68,1-5 (Si l'on enjoint à un frère des choses impossibles)

¹Si l'on enjoint à un frère des choses difficiles ou impossibles, il recevra en toute mansuétude et obéissance le commandement qui lui est fait. ²Cependant, s'il estime que le poids du fardeau dépasse entièrement la mesure de ses forces, il représentera au supérieur les raisons de son impuissance, avec patience et à propos, ³sans témoigner ni orgueil, ni résistance, ni contradiction. Que si après cette représentation le supérieur maintenait son ordre, l'inférieur se persuadera que la chose lui est avantageuse, et il obéira par amour, en mettant sa confiance dans l'aide de Dieu.

… pour chaque jour

Les manuscrits de la Règle, s’inspirant de la première phrase de ce chapitre lui ont donné comme titre : « Si un frère se voit enjoindre quelque chose d’impossible ». Un titre correspondant peut-être mieux au contenu de ce chapitre serait : « Dialogue et obéissance ».
Ici, comme en beaucoup d’autres endroits de la Règle nous voyons la différence essentielle entre l’obéissance de type ascétique et pédagogique qui lie le disciple au maître dans les milieux anachorétiques ou semi-anachorétiques et l’obéissance cénobitique, qui est une recherche en commun de la volonté de Dieu, le rôle de l’abbé étant d’animer et de guider cette recherche, et non pas de donner des ordres « pour faire pratiquer l’obéissance ».
Il faut remarquer évidemment aussi, non pas la contradiction (car il n’y en a pas) mais la différence d’accentuation entre les exigences assez radicales de l’obéissance décrites par Benoît au chapitre 5 de sa Règle, et ce qu’il écrit en ce chapitre 68, fruit d’une longue expérience et de beaucoup de sagesse. Au chapitre 5, Benoît exprimait les exigences absolues de l’obéissance et des principes qui doivent guider le moine dans sa vie communautaire. Il disait des moines vraiment obéissants : « De tels moines, délaissant sur le champ leurs propres affaires et renonçant à leur volonté propre, se libèrent immédiatement, et laissant inachevé ce qu’ils faisaient, ils exécutent effectivement l’ordre donné avec la promptitude de l’obéissance ». Ici Benoît se met du côté de celui qui doit obéir et de ce qu’il éprouve si on lui donne un ordre qu’il se sent incapable d’exécuter.
Pour comprendre ce chapitre il faut bien se rappeler que pour Benoît, l’essentiel de l’obéissance – pour tous, y compris l’abbé – est de se conformer à la volonté de Dieu. Toutes les médiations et toutes les structures d’autorité et d’obéissance au sein de la communauté monastique n’ont d’autre but que de rechercher et de découvrir ensemble ce qui est conforme aux plans de Dieu dans telle et telle circonstance. Benoît prévoit qu’il peut arriver que l’abbé, qui a pour tâche d’animer la recherche communautaire, puisse demander à un frère d’accomplir au sein de la communauté une tâche que le frère ne se sent pas capable d’accomplir. Que faire alors ? Entrer en dialogue, c’est-à-dire confronter les deux perceptions de la volonté divine pour arriver si possible à la même vision et la même conviction. Cela suppose de part et d’autre une attitude d’écoute – d’écoute de Dieu d’abord, d’écoute mutuelle ensuite. Benoît décrit en ce chapitre ce que doit être dans une telle situation l’attitude du moine. 

(DOM ARMAND VEILLEUX ocso [°1937 - …], Commentaire de la Règle de saint Benoît, Abbaye Notre-Dame de Scourmont, 10 mars 2013)









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