12 juillet

S’empresser de donner réponse avec une charité fervente.
(Règle de Saint Benoît 66,4)



La Règle de Saint Benoît…

RB 34,1-7 (Si tous doivent recevoir également le nécessaire)

¹Comme il est écrit: « On partageait à chacun selon ses besoins. » ²Par là, nous ne disons point qu'on fasse acception des personnes - ce qu'à Dieu ne plaise - mais qu'on ait égard aux infirmités. ³Celui qui aura besoin de moins, rendra grâces à Dieu et ne s'attristera point ; celui à qui il faut davantage, s'humiliera et ne s'élèvera point à cause de la miséricorde qu'on lui fait. Ainsi tous les membres seront en paix. Avant tout, que jamais n'apparaisse le vice du murmure, pour quelque raison que ce soit, ni en paroles, ni en un signe quelconque. Si quelqu'un est reconnu coupable, il sera soumis à une correction sévère.




… pour chaque jour

De cette petite phrase : « On donnait à chacun selon ses besoins », Benoît donne un commentaire en trois brefs versets.
Voici le premier : « Nous disons qu’il faut, non pas faire acception de personnes… mais prendre en considération les infirmités ». Déjà au chapitre 2, sur les qualités que doit avoir l’abbé, Benoît lui avait recommandé de ne pas faire acception de personnes (RB 2,20), citant Romains 2,11, où il est dit que Dieu ne fait pas acception de personnes. Il s’agissait, dans cette citation, au chapitre 2, de ne pas faire de distinction entre les personnes selon leur provenance sociale, car « esclave ou homme libre, nous sommes tous un dans le Christ ». Donc, au monastère on ne traitera pas quelqu’un différemment selon la dignité, de quelque ordre que ce soit, qu’il avait au moment de son entrée au monastère, mais on prendra en considération les « infirmités » de chacun. Un besoin est toujours une forme d’infirmité, puisqu’il est un manque qui doit être comblé.
Dans les deux phrases suivantes, Benoît donne des conseils aussi bien à ceux qui ont plus de besoins et qui donc reçoivent plus d’attention, qu’à ceux qui ont moins de besoins et qui, en conséquence, reçoivent moins.
« Que celui qui a besoin de moins rende grâce à Dieu et ne s’attriste pas ». Par le renoncement à soi-même, qui est une condition pour suivre le Christ, et qui est une des attitudes constitutives de l’état monastique, nous nous engageons à ne rien posséder et à ne rien recevoir, sauf ce qui est vraiment nécessaire pour satisfaire nos besoins essentiels. On peut lire en filigrane la recommandation de Jésus de ne pas se préoccuper du lendemain. Si nous sommes en bonne santé, fort, autonome, il est normal qu’on s’occupe peu de nous. Il faut alors avoir une double attitude : rendre grâce à Dieu de ce qu’il nous a donné et qui nous permet de vivre la pauvreté du cœur et ne pas s’attrister de recevoir moins que les autres et de ce qu’on s’occupe moins de nous. Ne pas s’attrister, car la tristesse empêche que naisse en notre cœur le désir.
À celui qui a de plus grands besoins, Benoît fait aussi deux recommandations : d’abord que son infirmité, ou ses limites (de quelque ordre qu’elles soient) le rende humble, et, d’autre part de ne pas s’enorgueillir de la bonté que les autres ont à notre égard. Si on nous manifeste plus d’attention, ce n’est pas parce que nous sommes plus importants, mais parce que nous sommes plus nécessiteux.
« Ainsi – conclut Benoît – tous les membres seront en paix ». Ce souci de la paix, qui est essentielle à la vie communautaire, est si fort chez Benoît, que le mot PAX est devenu une sorte de logo caractérisant la vie bénédictine. Cette paix, c’est celle d’une communauté où tous n’ont qu’un cœur et qu’une âme.
Et Benoît termine par une mise en garde contre le murmure, ou la récrimination, quel que soit son motif et quelle que soit la façon dont on la manifeste.
Ce qui frappe dans ce texte, c’est sa grande humanité. Benoît n’y fait pas de grandes élaborations théologiques ou spirituelles sur la communauté. Pour lui, la communauté c’est un groupe d’hommes concrets ayant chacun ses infirmités et ses besoins, et s’efforçant de répondre aux besoins des uns et des autres en se manifestant mutuellement de la bonté. On est loin d’une vague notion d’égalitarisme impersonnel. 

(DOM ARMAND VEILLEUX ocso [°1937 - …], Commentaire de la Règle de saint Benoît, Abbaye Notre-Dame de Scourmont, 28 août 2011)










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