1 septembre

On prendra soin des malades avant tout et par-dessus tout.
(Règle de Saint Benoît 36,1)



La Règle de Saint Benoît…

RB Prologue 1-7

¹Écoute, mon fils, les préceptes du Maître et prête l'oreille de ton cœur. Reçois volontiers l'enseignement d'un si bon père et mets-le en pratique, ²afin de retourner par l'exercice de l'obéissance à celui dont t'avait éloigné la lâcheté de la désobéissance. ³C'est à toi donc maintenant que s'adresse ma parole, à toi, qui que tu sois, qui renonces à tes volontés propres et prends les fortes et nobles armes de l'obéissance, afin de combattre pour le Seigneur Christ, notre véritable Roi. Avant tout, demande-lui par une très instante prière qu'il mène à bonne fin tout bien que tu entreprennes; ainsi, après avoir daigné nous admettre au nombre de ses enfants, il n'aura pas sujet, un jour, de s'affliger de notre mauvaise conduite. Car, en tout temps, il faut avoir un tel soin d'employer à son service les biens qu'il a mis en nous, que non seulement il n'ait pas lieu, comme un père offensé, de priver ses fils de leur héritage, mais encore qu'il ne soit pas obligé, comme un maître redoutable et irrité de nos méfaits, de nous livrer à la punition éternelle, tels de très mauvais serviteurs qui n'auraient pas voulu le suivre jusqu'à la gloire.



… pour chaque jour

Jean était la voix, mais le Seigneur au commencement était la Parole. Jean, une voix pour un temps ; le Christ, la Parole au commencement, la Parole éternelle.
Enlève la parole, qu’est-ce que la voix ? Là où il n’y a rien à comprendre, c’est une sonorité vide. La voix sans la parole frappe l’oreille, elle n’édifie pas le cœur.
Cependant, découvrons comment les choses s’enchaînent dans notre propre cœur qu’il s’agit d’édifier. Si je pense à ce que je dis, la parole est déjà dans mon cœur ; mais lorsque je veux te parler, je cherche comment faire passer dans ton cœur ce qui est déjà dans le mien.
Si je cherche donc comment la parole qui est déjà dans mon cœur pourra te rejoindre et s’établir dans ton cœur, je me sers de la voix, et c’est avec cette voix que je te parle : le son de la voix conduit jusqu’à toi l’idée contenue dans la parole ; alors, il est vrai que le son s’évanouit ; mais la parole que le son a conduite jusqu’à toi est désormais dans ton cœur sans avoir quitté le mien.
Lorsque la parole est passée jusqu’à toi, n’est-ce donc pas le son qui semble dire lui-même : Lui, il faut qu’il grandisse ; et moi, que je diminue ? Le son de la voix a retenti pour accomplir son service, et il a disparu, comme en disant : Moi, j'ai la joie en plénitude. Retenons la parole, ne laissons pas partir la parole conçue au fond de nous.
Tu veux voir comment la voix s’éloigne, tandis que demeure la divinité de la Parole ? Où est maintenant le baptême de Jean ? Il a accompli son service, et il a disparu. Maintenant le baptême du Christ se multiplie. Tous nous croyons au Christ, nous espérons le salut dans le Christ : c’est cela que la voix faisait entendre.
Il est difficile de distinguer la parole de la voix, et c’est pourquoi on a pris Jean pour le Christ. On a pris la voix pour la parole ; mais la voix s’est fait connaître afin de ne pas faire obstacle à la parole. Je ne suis pas le Christ, ni Élie, ni le Prophète. On lui réplique : Qui es-tu donc ? Il répond : Je suis la voix de celui qui crie dans le désert : Préparez la route pour le Seigneur. La voix qui crie à travers le désert, c’est la voix qui rompt le silence. Préparez la route pour le Seigneur, cela revient à dire : Moi, je retentis pour faire entrer le Seigneur dans le cœur ; mais il ne daignera pas y venir, si vous ne préparez pas la route.
Que signifie : Préparez la route, sinon : Priez comme il faut ? Que signifie : Préparez la route, sinon : Ayez d’humbles pensées ? Jean vous donne un exemple d’humilité. On le prend pour le Messie, il affirme qu’il n’est pas ce qu’on pense, et il ne profite pas de l’erreur d’autrui pour se faire valoir.
S’il avait dit : « Je suis le Messie », on l’aurait cru très facilement, puisqu’on le croyait avant même qu’il ne parle. Il l’a nié : il s’est fait connaître, il s’est défini, il s’est abaissé.
Il a vu où se trouvait le salut ; il a compris qu’il n’était que la lampe, et il a craint qu’elle ne soit éteinte par le vent de l’orgueil. 

(SAINT AUGUSTIN D’HIPPONE [°354 – 〸430], Sermon pour la Nativité de Jean Baptiste)









 31 août

On donnera des aides à ceux qui sont faibles,
afin qu’ils s’acquittent de leur tâche sans tristesse.
(Règle de Saint Benoît 35,3)



La Règle de Saint Benoît…

RB 73,1-9 (Toute la pratique de la justice n'est pas contenue dans cette règle)

¹Cette Règle, que nous venons d'écrire, il suffira de l'observer dans les monastères pour faire preuve d'une certaine rectitude morale et d'un commencement de vie monastique. ²Quant à celui qui aspire à la vie parfaite, il a les enseignements des saints Pères, dont la pratique amène l'homme jusqu'aux sommets de la perfection. ³Est-il, en effet, une page, est-il une parole d'autorité divine, dans l'Ancien et le Nouveau Testament, qui ne soit une règle toute droite pour la conduite de notre vie ? Ou encore, quel est le livre des saints Pères catholiques qui ne nous enseigne le droit chemin pour parvenir à notre Créateur ? Et de même, les Conférences des Pères, leurs Institutions et leurs Vies ainsi que la Règle de notre Père saint Basile, sont-elles autre chose que des instruments de vertus pour moines vraiment bons et obéissants ? Il y a là pour nous, relâchés, inobservants et négligents, de quoi rougir de confusion. Qui donc que tu sois, qui te hâtes vers la patrie céleste, accomplis, avec l'aide du Christ, cette toute petite Règle, écrite pour les débutants. Cela fait, tu parviendras avec la protection de Dieu, aux plus hautes cimes de la doctrine et des vertus, que nous venons de rappeler. Amen.





… pour chaque jour

L’homme, avant de croire au Christ, n’est pas en route, il erre. Il cherche sa patrie mais il ne la connaît pas. Que veut dire : il cherche sa patrie ? Il recherche le repos, il cherche le bonheur. Demande à un homme s’il veut être heureux, il te répondra affirmativement sans hésiter. Le bonheur est le but de toutes nos existences.
Mais où est la route, où trouver le bonheur, voilà ce que les hommes ignorent. Ils errent. Errer est déjà une recherche. Mais le Christ nous a remis sur la bonne route ; en devenant ses fidèles, par la foi, nous ne sommes pas encore parvenus à la patrie, mais nous marchons déjà sur la route qui y mène. L’amour de Dieu, l’amour du prochain sont comme les pas que nous faisons sur cette route.
Qui aime, court ; plus tu aimes fort, plus vite tu marches ; qui aime mollement, progresse lentement ; qui n’aime pas, n’avance pas ; qui aime le monde, regarde en arrière, et n’est pas tendu vers la patrie. 

(SAINT AUGUSTIN D’HIPPONE [°354 – 〸430], PSAUME 14 – « Qui entrera comme hôte sous ta tente », dans : SAINT AUGUSTIN PRIE LES PSAUMES – Textes choisis et traduits par A.-G. Hamman, p. 41)









 30 août

Les frères se serviront mutuellement.
Personne ne sera dispensé du service de la cuisine,
sinon pour cause de maladie
ou pour quelque occupation de grande utilité.
(Règle de Saint Benoît 35,1)



La Règle de Saint Benoît…

RB 72,1-12 (Le bon zèle que doivent avoir les moines)

¹Il est un mauvais zèle, un zèle amer, qui sépare de Dieu et mène à l'enfer. ²De même, il est un bon zèle qui sépare des vices et mène à Dieu et à la vie éternelle. ³C'est ce zèle que les moines pratiqueront avec un très ardent amour : ils s'honoreront mutuellement avec prévenance; ils supporteront avec une très grande patience les infirmités d'autrui, tant physiques que morales ; ils s'obéiront à l'envi ; nul ne recherchera ce qu'il juge utile pour soi, mais bien plutôt ce qui l'est pour autrui ; ils s'accorderont une chaste charité fraternelle ; ils craindront Dieu avec amour ; ¹⁰ils aimeront leur abbé avec une charité sincère et humble ; ¹¹ils ne préfèreront absolument rien au Christ ; ¹²qu'Il nous amène tous ensemble à la vie éternelle !



… pour chaque jour

Les hommes ont peur des femmes. C’est une peur qui leur vient d’aussi loin que leur vie. C’est une peur du premier jour qui n’est pas seulement peur du corps, du visage et du cœur de la femme, qui est aussi bien peur de la vie et peur de Dieu. Car ces trois-là se tiennent de près – la femme, la vie et Dieu. Qu’est-ce qu’une femme ? Personne ne sait répondre à cette question, pas même Dieu qui pourtant les connaît pour avoir été engendré par elles, nourri par elles, bercé par elles, veillé et consolé par elles. Les femmes ne sont pas Dieu. Les femmes ne sont pas tout à fait Dieu. Il leur manque très peu pour l’être. Il leur manque beaucoup moins qu’à l’homme. Les femmes sont la vie en tant que la vie est au plus près du rire de Dieu. Les femmes ont la vie en garde pendant l’absence de Dieu, elles ont en charge le sentiment limpide de la vie éphémère, la sensation de base de la vie éternelle. 

(CHRISTIAN BOBIN [°1951 – 〸2022], Le Très-Bas, Coll. L’un et l’autre, dirigée par J.-B. Pontalis, Éditions Gallimard, 1992, p. 97)









 29 août

Avant tout que jamais n’apparaisse le vice du murmure,
pour quelque raison que ce soit,
ni en paroles, ni en un signe quelconque.
(Règle de Saint Benoît 34,6)



La Règle de Saint Benoît…

RB 71,1-9 (Que les frères s'obéissent mutuellement)

¹Ce n'est pas seulement à l'abbé que tous les frères doivent rendre le bien de l'obéissance; il faut encore qu'ils s'obéissent les uns aux autres. ²Ils sauront que c'est par cette voie de l'obéissance qu'ils iront à Dieu. ³Plaçant avant tout les ordres de l'abbé et ceux des responsables qu'il a établis -ordres auxquels nous ne permettons pas de préférer les directives d'origine privée - tous les jeunes obéiront pour le reste à leurs anciens, en toute charité et empressement. S'il se rencontre quelqu'un qui ait l'esprit de contestation, il sera châtié. Lorsqu'un frère est repris par l'abbé ou par un supérieur quelconque en n'importe quelle manière, et pour une cause même de peu d'importance, s'il s'aperçoit alors tant soit peu que l'esprit de ce supérieur est irrité ou ému contre lui, fût-ce légèrement, il se prosternera aussitôt sans tarder par terre, à ses pieds, pour faire satisfaction jusqu'à ce que la bénédiction qu'on lui donnera ait fait connaître que l'émotion est calmée. Si quelqu'un dédaigne d'en agir ainsi, il sera soumis à un châtiment corporel, et, s'il demeure opiniâtre, il sera expulsé du monastère.



… pour chaque jour

Qu’ils s’obéissent mutuellement. Il faudrait être Notre-Seigneur lui-même pour commenter ce chapitre. Cette obéissance fraternelle parfaite. Cela suppose que nous reconnaissons le visage du Christ en chacun de nos frères. Obéir en tout. Cette obéissance spirituelle parfaite suppose délicatesse de ceux qui commandent et délicatesse de ceux qui obéissent. Humainement, ce n’est pas commode. Que tous ceux qui ont une autorité s’harmonisent d’abord avec le premier supérieur, le père du monastère ; que le père abbé s’harmonise lui-même avec la Règle… Savoir demander pardon, c’est là un signe d’humilité, de charité et d’obéissance.

Écoute, 1960

(Dom DENIS HUERRE osb [°1915 – 〸2016], Quel est l’homme qui désire voir des jours heureux ? Commentaires de la Règle de saint Benoît, préface du P. Luc Cornuau osb, abbé de la Pierre-qui-Vire, Saint-Léger Éditions, 2023, p. 663)









 28 août

Celui qui a besoin de moins,
rendra grâces à Dieu et ne s’attristera point ;
celui à qui il faut davantage,
s’humiliera et ne s’élèvera point
à cause de la miséricorde qu’on lui fait.
Ainsi tous les membres seront en paix.
(Règle de Saint Benoît 34,3-5)



La Règle de Saint Benoît…

RB 70,1-7 (Que nul ne se permette de frapper à tout propos)

¹Il faut éviter dans le monastère toute occasion de présomption ; ²aussi ordonnons-nous qu'il ne sera permis à personne d'excommunier ou de frapper l'un de ses frères, à moins qu'il n'en ait reçu pouvoir de l'abbé. ³Ceux qui commettront des fautes seront repris devant tout le monde, afin que les autres en conçoivent de la crainte. Les enfants, jusqu'à l'âge de quinze ans, seront sous la garde et la surveillance de tous les frères ; mais cette vigilance s'exercera avec mesure et intelligence. Quant à celui qui se permettrait, sans l'ordre de l'abbé, de réprimander de façon quelconque des frères plus âgés, ou qui s'emporterait contre des enfants sans discrétion, il serait soumis à la discipline régulière, car il est écrit: « Ce que tu ne veux pas qu'on te fasse, ne le fais pas à autrui. »



… pour chaque jour

Mais l’homme qui agit avec présomption, n’écoutant ni le prêtre qui se tient là pour le service du Seigneur ton Dieu, ni le juge, cet homme-là mourra. Tu ôteras le mal d’Israël.
Le peuple tout entier l’apprendra et sera saisi de crainte ; il n’agira plus avec présomption. 

(Deutéronome 17,12-13 – La Bible – AELF)









 27 août

Que tout soit commun à tous…
(Règle de Saint Benoît 33,6)



La Règle de Saint Benoît…

RB 69,1-4 (Que nul dans le monastère ne se permette d'en défendre un autre)

¹Il faut veiller à ce que personne, en aucune circonstance, dans le monastère, ne se permette de défendre un autre moine, ou de lui servir comme de protecteur, ²et cela, quel que soit le degré de parenté qui les unisse. ³Les moines ne se le permettront d'aucune manière, car il peut en résulter de très graves occasions de conflits. Si quelqu'un transgresse cette défense, on le punira très sévèrement.



… pour chaque jour

Que nul ne se permette. On peut remarquer que la formule du titre est analogue dans les chapitres 69 et 70. C’est qu’il y a des gens au tempérament de défenseur, tandis que d’autres ont un tempérament de justicier. Les uns et les autres risquent d’intervenir indiscrètement dans la vie de leurs frères et de s’occuper de ce qui ne les regarde pas. Évitons autant que possible l’une et l’autre tendance, respectons-nous, laissons-nous vivre paisiblement. Il revient à chacun de gouverner son existence, en union avec ses supérieurs, et personne ne peut empêcher l’exercice de cette responsabilité première. Respect, discrétion, silence, autant de signes d’une véritable appréciation des autres dont ne témoigne pas, au contraire, l’ingérence indiscrète dans leur vie.

Écoute, 1967

(Dom DENIS HUERRE osb [°1915 – 〸2016], Quel est l’homme qui désire voir des jours heureux ? Commentaires de la Règle de saint Benoît, préface du P. Luc Cornuau osb, abbé de la Pierre-qui-Vire, Saint-Léger Éditions, 2023, p. 655)









 26 août

Une bonne parole vaut mieux qu’un don excellent.
(Règle de Saint Benoît 31,14)



La Règle de Saint Benoît…

RB 68,1-5 (Si l'on enjoint à un frère des choses impossibles)

¹Si l'on enjoint à un frère des choses difficiles ou impossibles, il recevra en toute mansuétude et obéissance le commandement qui lui est fait. ²Cependant, s'il estime que le poids du fardeau dépasse entièrement la mesure de ses forces, il représentera au supérieur les raisons de son impuissance, avec patience et à propos, ³sans témoigner ni orgueil, ni résistance, ni contradiction. Que si après cette représentation le supérieur maintenait son ordre, l'inférieur se persuadera que la chose lui est avantageuse, et il obéira par amour, en mettant sa confiance dans l'aide de Dieu.



… pour chaque jour


Car tel est l’amour de Dieu :
garder ses commandements ;
et ses commandements ne sont pas un fardeau,
puisque tout être qui est né de Dieu est vainqueur du monde.
Or la victoire remportée sur le monde, c’est notre foi.

(I Jean 5,3-4 – La Bible – AELF)










 25 août

Chacun doit être traité
selon son âge et son degré d’intelligence.
(Règle de Saint Benoît 30,1)



La Règle de Saint Benoît…

RB 67,1-7 (Des frères que l'on envoie en voyage)

¹Les frères qui doivent aller en voyage se recommanderont à la prière de tous les frères et de l'abbé. ²Après la dernière oraison de l'Œuvre de Dieu, on fera toujours mémoire de tous les absents. ³En rentrant de voyage, le jour même de leur retour, les frères se prosterneront à terre dans l'oratoire à toutes les heures canoniales, quand s'achève l'Œuvre de Dieu. Ils demanderont les prières de tous, à cause des écarts qu'ils auraient pu commettre en voyage, par leurs regards, ou en écoutant de mauvaises choses ou de vains propos. Personne ne se permettra de rapporter sans discernement à autrui ce qu'il aurait vu ou entendu hors du monastère, car cela produit de très grands dégâts. Celui qui oserait le faire sera soumis à la correction régulière. De même celui qui se permettrait de sortir de l’enceinte du monastère, ou d'aller n'importe où, ou de faire quoi que ce soit, même de peu d'importance, sans l'autorisation de l'abbé.



… pour chaque jour

Il s’agit de ce qu’on a pu entendre en dehors du monastère. Il suffit d’avoir un peu de bon sens pour taire ce qui n’est pas à dire. Il suffit d’un rien pour piquer la curiosité d’une façon plus ou moins malsaine ou du moins nuisible à notre vie intérieure. Cela s’applique à tous nos propos. Pensons qu’ils ont forcément une influence sur la vie spirituelle du monastère. Même un seul mot. C’est ainsi. Nous sommes, en effet, étroitement liés les uns aux autres par une véritable parenté spirituelle : d’où une responsabilité réelle les uns par rapport aux autres, et le compte que nous aurons à rendre de ce que nous aurons fait ou n’aurons pas fait pour celui et ceux que le Seigneur nous avait confiés. Discernement chez celui qui parle. Mais aussi chez celui qui entend. Il faut savoir discerner à la place de celui qui parlerait sans discernement. Un peu d’intelligence seulement permet de rétablir les choses, en ne faisant pas de drames avec des peccadilles ou des scandales avec des riens. Et, au fond de son cœur, réparer devant Dieu les fautes commises par la langue dont on peut être témoins. Le fait d’être consacrés à Dieu ne nous met pas à l’abri des écarts de langage, des maladresses, de fautes même qui peuvent avoir des conséquences fâcheuses.
Le chapitre du soir, avec son aspect familial, a un rôle important dans notre vie de communauté. Le père abbé y donne parfois quelques nouvelles intérieures ou extérieures : là encore, il faut nous garder d’une curiosité qui n’est pas bonne, une démangeaison d’information immédiate qui ne nous apporte rien, n’apporte rien au monde. Non pas que nous devions nous retrancher dans une indifférence égoïste à tout ce qui préoccupe nos contemporains. Bien au contraire. Il faut tout faire pour avoir un monastère à la fois ouvert et silencieux. Plus il sera silencieux, attentif à Dieu d’abord, plus il sera ouvert aux besoins de l’Église et plus nos hôtes y trouveront ce qu’ils viennent y chercher.

Écoute, 1962

(Dom DENIS HUERRE osb [°1915 – 〸2016], Quel est l’homme qui désire voir des jours heureux ? Commentaires de la Règle de saint Benoît, préface du P. Luc Cornuau osb, abbé de la Pierre-qui-Vire, Saint-Léger Éditions, 2023, p. 647-648)









 24 août

Qu’il imite plutôt l’exemple de tendresse du bon Pasteur…
(Règle de Saint Benoît 27,8)



La Règle de Saint Benoît…

RB 66,1-8 (Les portiers du monastère)

¹À la porte du monastère on placera un sage vieillard, qui sache recevoir et rendre un message, et dont la maturité le préserve de toute oisiveté. ²Le portier devra avoir sa cellule près de la porte, afin que ceux qui viennent trouvent toujours à qui parler. ³Et aussitôt qu'on aura frappé ou qu'un pauvre aura appelé, il répondra Deo gratias ou Benedic. Puis, avec toute la mansuétude que donne la crainte de Dieu, il s'empressera de donner réponse avec une charité fervente. Si le portier a besoin d'aide, on lui donnera un frère plus jeune. Le monastère doit, autant que possible, être disposé de telle sorte que l'on y trouve tout le nécessaire: de l'eau, un moulin, un jardin et des ateliers pour qu'on puisse pratiquer les divers métiers à l'intérieur de la clôture. De la sorte les moines n'auront pas besoin de se disperser au-dehors, ce qui n'est pas du tout avantageux pour leurs âmes. Et nous voulons que cette Règle soit lue souvent en communauté afin qu'aucun frère ne s'excuse sous prétexte d'ignorance.



… pour chaque jour

La porterie du monastère est le point de contact entre l’abbaye et le monde extérieur. Pour tous ceux qui viennent au monastère, c’est le premier contact, et pour plusieurs, ce sera peut-être le seul, s’ils ne sont que des visiteurs de passage. Il est donc important qu’ils y perçoivent une juste vision de ce qui se vit à l’intérieur. Et c’est pourquoi Benoît demande que le portier soit un homme d’âge mûr et sage senes sapiens, qui sache recevoir et fournir un renseignement.
(…)
De ce chapitre je voudrais retenir deux brèves expressions de la phrase suivante : « … aussitôt que quelqu’un frappe ou qu’un pauvre appelle, il [le portier] répondra Deo gratias ou Benedic et avec toute la douceur de la crainte de Dieu, il se hâtera de répondre avec la ferveur de la charité ».
Les deux expressions « douceur de la crainte de Dieu », c’est-à-dire la douceur (mansuetudo en latin) qu’engendre la crainte de Dieu et « ferveur de la charité », expriment bien l’attitude que non seulement le portier mais tout moine doit avoir à l’égard de quiconque se présente au monastère, et particulièrement des pauvres : douceur et charité fervente. 

(DOM ARMAND VEILLEUX ocso [°1937 - …], Commentaire de la Règle de saint Benoît, Abbaye Notre-Dame de Scourmont, 27 janvier 2013)









 23 août

La prière doit être brève et pure,
à moins que peut-être la grâce de l’inspiration divine
ne nous incline à la prolonger.
(Règle de Saint Benoît 20,4)



La Règle de Saint Benoît…

RB 65,11-22 (Le prieur du monastère)

¹¹C'est pourquoi nous jugeons que, pour conserver la paix et la charité, il faut que le gouvernement de son monastère dépende entièrement de l'abbé. ¹²Si faire se peut, toute la marche du monastère sera assurée par des doyens, et cela selon les ordres de l'abbé, comme nous l'avons déjà dit. ¹³Les charges étant confiées à plusieurs, un seul n'aura pas l'occasion de s'enorgueillir. ¹⁴Si toutefois le lieu rend un prieur désirable, ou si la communauté le demande pour un juste motif, et avec humilité, si l'abbé enfin le juge à propos, ¹⁵c'est ce dernier qui établira lui-même pour prieur celui qu'il aura choisi avec le conseil des frères craignant Dieu. ¹⁶Le prieur exécutera avec respect tout ce que son abbé lui prescrira, sans jamais contrevenir à sa volonté et à ses ordres. ¹⁷Car, plus il est élevé au-dessus des autres, plus il doit observer consciencieusement les préceptes de la Règle. ¹⁸Si ce prieur tombait dans quelque dérèglement, s'enflait d'orgueil, ou était convaincu de mépris pour la sainte Règle, on l'en reprendrait jusqu'à quatre fois. ¹⁹S'il ne s'amendait pas, on lui ferait subir la correction de la discipline régulière. ²⁰Si par ces moyens il ne se corrigeait pas encore, on le déposerait de son rang de prieur, et on mettrait à sa place un autre qui en fût digne. ²¹Enfin, si après tout cela, il ne se montrait pas tranquille et obéissant dans la communauté, on le chasserait du monastère. ²²Que l'abbé songe cependant qu'il doit rendre compte à Dieu de toutes ses décisions, de crainte que le feu de l'envie ou de la jalousie ne vienne à brûler son âme.



… pour chaque jour

Pour la sauvegarde de la paix et de la charité. L’unité dans la communauté est une condition essentielle pour qu’on y trouve Dieu. La désunion, c’est l’échec total. L’unité de l’Église, l’unité de la famille monastique, sont l’expression vivante de l’Unité divine. De la part de Dieu, tout est fait pour réaliser en nous et entre nous l’unité, car il nous a donné son Esprit en plénitude, par qui, en qui, l’unité de Dieu devient nôtre. À nous de ne pas faire obstacle à cette unité. Concrètement, avoir la passion de la volonté de Dieu ; à tout instant faire ce que Dieu veut. Cette attitude foncière de l’âme résout les difficultés de notre vie d’oraison dont le fond est de faire tout pour Dieu et avec Dieu. L’âme désireuse de s’unir continuellement à la volonté de Dieu ne peut pas ne pas devenir une urne d’oraison. L’unité entre nous est à la mesure du désir que personnellement nous avons de Dieu. Des hommes, réunis dans un but autre que Dieu, ne sauraient arriver à l’unité ; un jour ou l’autre, lorsque les intérêts divergent, la dissension, l’opposition, ont vite brisé des liens aussi fragiles que les intérêts qui les ont créés.

Écoute, 1956

(Dom DENIS HUERRE osb [°1915 – 〸2016], Quel est l’homme qui désire voir des jours heureux ? Commentaires de la Règle de saint Benoît, préface du P. Luc Cornuau osb, abbé de la Pierre-qui-Vire, Saint-Léger Éditions, 2023, p. 636)